PODCAST : Les nouvelles technologies et la numérisation au service des industries

Connaissez-vous le réel impact que la numérisation et les nouvelles technologies peuvent avoir sur votre site industriel ?

Bonjour à tous et bienvenu dans le troisième épisode d’ENERGY 4.0, le podcast traitant de tous les sujets d’actualités autour de la décarbonation et de la transition énergétique.

La numérisation des processus de production est l’un des principaux enjeux de l’industrie 4.0. Les entreprises industrielles sont exposées aux difficultés d’approvisionnement, à la hausse des prix due à la pénurie de matières premières, au manque de main d’œuvre, et doivent se conformer aux règlementations (facturation numérique) ou encore aux enjeux environnementaux. Les contraintes et problématiques s’accumulent et les industriels cherchent en digitalisant leurs process à faire face à ces défis qui peuvent nuire à leur productivité et leur flexibilité. Il est important pour eux de se doter de logiciels de gestion adaptés à leur secteur d’activité et à leur organisation pour structurer et piloter efficacement leur organisation.

Pour en parler plus en détails, nous avons interviewé Patrick Pirrat, ancien responsable de recherche et de développement aux Chantiers de l’Atlantique.

Peux-tu te présenter à nos auditeurs ?

Je suis un retraité de l’industrie. J’ai travaillé 40 ans dans ce secteur, que ce soit dans le monde ferroviaire que dans le monde de la construction de bateaux. J’ai terminé ma carrière comme responsable de recherche et de développement dans le processus de construction des grands bateaux à Saint-Nazaire. Et depuis trois ans, je me mets à disposition du territoire, soit en tant que bénévole, soit sur des missions bien spécifiques, en tant qu’expert industriel pour donner un éclairage. Et qui dit expert industriel, dit bien sûr expert dans le monde du numérique industriel parce que les enjeux sont très importants.

Quelle est ta définition de l'industrie 4.0 et comment diffère-t-elle du type d’industrie précédente?

Je vais donner ma propre perception de l’industrie 4.0 avec mon vécu. Comment on peut les différencier ? On les différencie par cet apport de ce code et ce monde de l’Internet et de connexions qui sont intervenus dans nos usines et qui ont permis des échanges. Des échanges entre les machines elles-mêmes et entre les hommes et les machines.
Un des plus beaux exemples, on n’en parle jamais, mais il a apporté beaucoup de confort, ce sont les photocopieurs. Personne n’en parle, mais le premier COBOT qui est arrivé dans l’entreprise. Moi, je l’ai vécu, c’est le photocopieur. Et le photocopieur à enlever beaucoup, de tâches répétitives qui étaient de copier et de recopier et d’avoir des gens qui passaient leur temps à copier du texte, se mettre de l’encre sur les mains avec les stencil et compagnie. Donc ça amène des gains de productivité, ça amène des évolutions sur la santé, ça amène des évolutions dans l’environnement de l’entreprise.
Mais au delà de tout ça, ce qui est assez surprenant aujourd’hui, c’est qu’on parle toujours de l’industrie 4.0 dans le process de construction des usines. Mais l’industrie 4.0, elle est fondamentale aussi en conception, elle est fondamentale en gestion et elle est fondamentale dans toutes les actions de l’entreprise.

L’industrie 4.0 ne se limite pas seulement au secteur industriel.

On peut utiliser des exemples :

Si on prend la robotique, c’est sûr que c’est lié à l’industrie, même si on voit que le photocopieur est plutôt dans le monde de la gestion que dans l’usine. La cobotique concerne plutôt le process de construction. Mais si on prend la réalité augmentée ou la réalité virtuelle, ce sont surtout des expériences client qui sont ciblées.

Et on est plutôt dans le monde de la conception où on va aller s’immerger dans un futur produit qu’on va mettre en vente : un bâtiment, un local et ainsi de suite.

On n’est pas dans de la production pure et dure telle qu’on l’entend, mais bien dans la partie conception. Et puis, il y a plein d’autre d’autres technologies qui sont fondamentales aujourd’hui, tout ce qui concerne la maquette numérique par exemple. Elle est hyper utilisée dans le monde de la conception et elle va aujourd’hui jusque dans le monde de production. Voire, elle accompagne le produit dans la garantie et elle va jusque chez le client. Donc tout ça pour prendre un peu de recul et se dire attention, on parle d’industrie 4.0. On parle de technologie et ces technologies, elles s’adressent à tous les secteurs de l’entreprise.

Quels sont les principaux défis auxquels les entreprises doivent faire face lors de la transition vers l'industrie 4.0?

La première, elle est évidente, c’est l’investissement. Il faut avoir des capacités d’investir. Pourquoi ? C’est à la fois du matériel qu’il faut acheter et quand on est au début du processus, le matériel, il est plutôt cher, même si par la suite, les coûts baissent.

Mais une nouvelle techno en général, elle est plutôt chère.

Donc il y a toute une problématique de calcul de rentabilité. Est-ce que j’achète ? Est-ce que je connecte ? Est-ce que j’achète tous les connecteurs ? Est-ce que je mets le processus ?

La deuxième chose, c’est de choisir des solutions éprouvées. Ça, c’est un des grands défis pour un industriel, parce qu’il y a eu beaucoup d’échecs.

Combien de robots qu’on a voulu démarrer et qui ont fini au bout trois quatre mois après, au fond des usines, jamais réutiliser. Combien de logiciels qu’on a développé, qui ont tenu 6 mois-1 an et qu’on a rangé dans les armoires. Il y a un très gros sujet sur la qualité du logiciel ou des équipements qu’on achète et puis aussi leur maintenabilité, leurs performances dans le temps, leur capacité d’évolution. Ce sont des grandes questions.

Et après, la plus grande difficulté, c’est la résistance humaine, la résistance sociale qui était très forte et en plus portée par les experts et par les anciens qui ont le savoir-faire.

Donc, vous arrivez avec des nouvelles technologies que vous voulez mettre en place dans des processus. Ces processus sont complètement maîtrisés par des anciens qui ont peur de ces nouvelles technologies et en plus avec une peur collective qui est liée à la protection de l’emploi. Ça, c’est la plus grande difficulté !

Comment les technologies de l'intelligence artificielle peuvent-elles améliorer les processus de production et augmenter l'efficacité ?

On parle d’intelligence artificielle, on va surtout parler des technologies liées à l’intelligence artificielle. Pour faire simple, c’est la reconnaissance de l’image, c’est l’interprétation d’images, l’interprétation de la voix et de la communication, et bien d’autres choses. Il y a sept ou huit technologies majeures.

Elles viennent dans les process et elles apportent beaucoup de qualité et de performance. Si par exemple, on a besoin de maîtriser du dimensionnel. Il y a quelques années, on le fait avec des mètres, avec une incertitude qui était du centimètre ou du demi centimètre. On est passé au laser. Et puis maintenant, on est passé au scanner. Donc, on maîtrise et on est capable de re-simuler, on est capable d’interpréter et on peut mettre les process sous contrôle.

En conséquence, on va beaucoup plus vite dans le niveau de la performance attendue, on est capable de la vérifier. On va beaucoup plus vite dans les essais, les épreuves et donc on livre des produits de meilleure qualité. Plus on les met rapidement sur le marché et on fait évoluer d’une manière générale la performance.

La donnée est devenue une ressource essentielle pour le secteur industriel. Comment on récolte et optimise ces données collectées ?

Alors le grand problème qu’on avait avec les datas il y a 20-30 ans, dans le processus de production, c’était la qualité des données.
On a eu des grands programmes, on appelait ça le “ Juste à temps”, “Les qualités totales”. On a mis en place des systèmes de MRP2 pour les systèmes de planification.
On cherchait surtout à améliorer les données, avoir des stocks qui soient justes. Et en fait, on avait très souvent des chiffres dans les fichiers du magasin qui ne correspondaient pas à ce qu’il y avait dans les caisses. Donc, on a fait tout un travail, déjà de bien rentrer des données de qualité, que ce soit dans les dates de livraison, que ce soit dans les durées de fabrication.

Et ça, c’est un travail qui a duré très longtemps. On a mis pratiquement 20 ans pour atteindre cette performance. Maintenant qu’on a ce niveau-là, on a une explosion des data qui sont en train d’arriver. On est en train de développer des logiciels qui permettent d’aller vérifier si ce qu’on avait à rentrer était de qualité.

Et puis qui font du nettoyage, on a des gros cleaner qui commencent d’arriver.

Donc plus c’est itératif, plus c’est simple, et plus on a des grands volumes de data, plus on est capable de les rendre propres et de les rendre beaucoup plus utilisables.

Comment les entreprises peuvent-elles s'assurer que leurs employés sont formés aux nouvelles technologies et compétences nécessaires pour la transition vers l'industrie 4.0?

C’est une question qui est fondamentale. La première chose dont on ne parle pas souvent, c’est qu’en fait une grande partie de la formation à ces nouvelles technologies se fait aux postes de travail. Si on observe bien, ce sont les gens entre eux qui se forment. Il y a donc de la formation continue.

On voit bien quand il y a de nouveaux logiciels qui arrivent, les entreprises mettent en place des plans de formation assez importants. C’est le cas pour de la CAO (conception assistée par ordinateur), mais c’est le cas pour d’autres logiciels, même des logiciels de niche très spécifiques de calcul de structures, etcétéra. On va envoyer les gens dans les formations et plutôt dans des longues formations.

Et ensuite il y a de plus en plus de gens experts à l’intérieur de l’entreprise qui sont les référents dans l’entreprise. C’est souvent le cas pour les nouvelles technologies et on va voir cet expert, et puis c’est lui qui va rayonner sur le bureau d’études, sur l’atelier, sur les gens, les méthodes. Et il va les accompagner dans un domaine bien précis.

Ça, c’est 80 à 90 % du développement.

Alors ça marche bien sur des choses bien rodées, mais sur les nouvelles technos qui sont en train d’arriver, c’est un peu plus compliqué. Il faut les anticiper et c’est là aussi où il faut être en veille. En fait, à la difficulté qu’on n’a plus aujourd’hui, c’est d’avoir des profils, c’est trouver des profils qui ont cette compétence-là, non seulement d’absorber de la technologie, mais d’être capable de la restituer aux autres.

Et donc pour toi, est-ce que ça va devenir essentiel d'avoir une personne chargée de s'occuper des consommations d'énergie dans les industries ?

C’est évident, que ce soit pour la consommation d’énergie, l’évolution des datas, l’arrivée d’un nouveau logiciel, l’arrivée d’une nouvelle machine. Il faut qu’on développe dans les équipes des compétences, et chercher qui sont les référents ?
On parle beaucoup de référents. Je pense que c’est un levier important pour une évolution des postes de travail.

C’est aussi une évolution dans le management, c’est-à-dire qu’on voit des jeunes ingénieurs qui arrivent et qui, par leurs compétences, vont aller aider des anciens. Et ce sont les anciens qui ont un savoir-faire sur le métier en pur et dur. Et ce sont les jeunes qui amènent la technologie.

Et alors là, pour le coup, si le management est réussi, ça peut donner de très belles réussites.
Et ça, c’est vraiment quelque chose qui est à cultiver et à réfléchir dans les entreprises. Je vais prendre un exemple :  on se pose beaucoup de questions aujourd’hui sur “c’est quoi le futur poste de travail d’un développeur du bureau d’études ?”

Aujourd’hui, on dit qu’il a un poste de CAO et en très peu de temps et il va avoir à côté de lui un système olographe qui va représenter ce qu’il est en train de dessiner. Il va avoir une table 3D numérique qui permet d’aller travailler, d’aller poser des post-it et ainsi de suite…. Les anciens auront beaucoup de mal à passer sur ces nouvelles technologies, comme ils ont eu beaucoup de mal, à mon époque, de passer de la planche à dessin à la CAO 2D, puis la CAO 3D.

Et en fait, ce qu’on voit, c’est que quand on a des jeunes ingénieurs qui arrivent, qui commencent à maîtriser ces technologies, ces nouveaux logiciels, parce qu’ils les ont connus à l’école. Ce sont eux qui arrivent à entraîner les autres et à imaginer des solutions différentes. Et ça vient même impacter le processus de conception lui-même. Puisqu’il y a des interactions entre celui qui a le savoir-faire et celui qui maîtrise la techno. Et du coup, on a des ruptures assez importantes qui peuvent être faites. Mais c’est la grande question de demain, c’est : “Comment on intègre tout ça ?”.
Moi, je suis plutôt optimiste. Je trouve que si le management est bien fait, si on rentre dans les bons processus d’intégration des gens et d’intégration des technologies, ça peut être une aventure passionnante. J’aurai 25 ans ou 30 ans, ça me passionnerait

Quels sont les principaux avantages pour les consommateurs de l'industrie 4.0 ?

Alors… On n’en parle pas beaucoup. Mais en fait, les technologies sont très embarquées dans les systèmes. Maintenant, quand on a une voiture, c’est de la technologie 4.0, voire et qui commence à être de 5.0. La reconnaissance de la voix et les systèmes GPS.

Si vous oubliez de freiner, les caméras et les capteurs prennent la main et freinent à votre place. Donc voilà des choses très concrètes. Après, ça va beaucoup plus loin. On ne peut pas aujourd’hui ne pas intégrer dans la transition écologique les technologies qu’on va embarquer.

Et moi, aujourd’hui, je prétends même qu’il n’y aura pas de transition écologique réussie sans technologie. Un exemple un petit peu galvaudé, un peu caricatural, peut être simple, mais regardez, on a un développement du transport doux qui se fait aujourd’hui de plus en plus par le biais de la bicyclette électrique et des trottinettes électriques et d’autres types de transport.

Qu’est-ce qu’une bicyclette électrique ? C’est de la tech ! Et si on n’a pas cette technologie, il n’y a pas de bicyclette électrique. Et derrière le mot qui est fondamental, mais qu’il va falloir développer, c’est le mot hybridation. Hybridation entre les différentes technologies et hybridation entre l’homme et la machine.

Il y a des technologies qui sont nécessaires pour pouvoir faire la transition écologique. On voit bien que dans la maîtrise de l’énergie, ce sont les capteurs, c’est la communication entre les capteurs qui permet de réguler une consommation, de la maîtriser et ainsi de suite. C’est la même chose pour l’eau, c’est la même chose pour la vapeur, c’est la même chose dans tous les autres environnements.

Donc la technologie est indispensable dans cette transition et c’est ça qui vient impacter le consommateur. Et souvent, la technologie, on la développe dans les process d’usine et ensuite, on la positionne dans les produits qu’on développe et qu’on vend. Et ensuite ces technologies et on s’en rend plus compte, mais elle est mise à disposition du consommateur.

Comment les entreprises peuvent-elles gérer les risques de cybersécurité liés à l'utilisation croissante de technologies connectées dans l'industrie 4.0 ?

C’est évident et c’est le grand risque. Il y a tout un débat aujourd’hui autour du télétravail, du travail à distance. Ce qui se passe jusqu’à présent, ça se passe plutôt pas mal. Mais à partir du moment où un hacker ou un groupe de hackers vient intervenir sur des données qui sont sensibles et qui sont traitées à distance, ça peut mettre en péril le télétravail et les installations de télétravail qui sont mises en place.

Dans tous les cas aujourd’hui, un responsable d’entreprise est obligé de prévoir des plans B vis-à-vis du télétravail si jamais il est attaqué. Comment il fait pour rapatrier ses compétences, ses compétences vives qui doivent répondre à un marché, un client tout de suite. Il faut des plans B et il faut les prévoir. On ne sait pas bien tout ça, c’est un peu compliqué.

Déjà les deux mots “cyber” et “attaques”, les deux conjugués. On voit bien qu’il y a beaucoup d’incertitudes. Après, il faut aussi laisser le temps de se développer. On voit de l’intelligence qui se développe, on voit de l’IA qui se développe aussi. C’est un peu un jeu virtuel, mais c’est important.

Tous les cas, il y a des risques majeurs sur cette thématique-là. On le voit, elle est très prise en compte par les militaires, dans le monde de la santé. Donc, on voit qu’il y a des développements qui se font et pour l’industrie, ça pose des questions.

Quels sont les exemples les plus réussis d'entreprises qui ont réussi à mettre en place l'industrie 4.0 de manière efficace?

Alors de toute façon, les grandes entreprises et les entreprises qui ont réussi, qui sont des fleurons nationaux, elles ont toutes intégré le 4.0 et elles l’ont développé.
Moi, j’ai eu la chance de travailler avec des personnes d’Airbus dans l’aéronautique. C’est hyper développé et ils sont très en avance. Il y a aussi le secteur de l’automobile. Le monde de la construction militaire, les gens comme Naval groupe, il y a aussi des choses qui se sont développées de manière très importante et dans un monde encore plus complexe, avec des phénomènes de cybersécurité.

Après, on voit des développements aussi très réussis chez des startups qui sont devenues des PME, voire qui sont des belles ETI. En fait, toutes les entreprises que j’ai visitées et qui étaient en phase de réussite, elles avaient un fort taux d’intégration des nouvelles technologies, c’était systématique. Maintenant, il faut rajouter une chose, on positionne toujours l’implantation des technologies dans les entreprises de manière générique.

C’est comme ça que ça se passe !

Un industriel, lui, va regarder ce que font ses concurrents. Donc, on voit bien que le développement des technologies est différent selon les marchés. Et tout ça fait que je vous l’ai dit au début, c’est une affaire d’investissement et c’est une affaire de rentabilité. La rentabilité se mesure par rapport à son concurrent et sur son marché.

Donc, on a vu que, par exemple, que l’industrie 4.0 a eu beaucoup moins de prise sur le monde du bâtiment. On a vu que la notion de maquette numérique a mis beaucoup plus de temps dans le monde du bâtiment que dans le monde industriel. Ce n’est pas que les gens du monde du bâtiment sont plus bêtes, c’est que le marché, le système de concurrence, les choses mises en place, le fait que les bâtiments soient tous faits à distance les uns des autres avec une complexité fait qu’il a eu ce recul.

Mais il ne faut pas oublier non plus qu’il ne faut pas décontextualiser quand on parle d’industrie 4.0, des marchés qu’elle adresse.

Comment les gouvernements et les institutions peuvent-ils soutenir la transition vers l'industrie 4.0 et encourager l'innovation dans les entreprises ?

Alors oui, bien sûr. Et puis on attend toujours tout de l’Etat. Donc on ne va pas s’en priver non plus dans le monde de l’industrie. Mais ils font déjà beaucoup de choses. Il faut le savoir. Il y a beaucoup de choses qui sont faites et qui soutiennent l’industrie française dans ces domaines-là, mais pas assez.

Et pas assez, de mon point de vue, car c’est très compliqué aujourd’hui d’upgrader de nouvelles technologies dans un processus de production. Pourquoi ? Parce que quasiment, vous mettez en péril votre processus de production. Il faut l’arrêter, voire il va falloir, le pénaliser ou le mettre sous tension. Vous, vous avez les clients à servir, vous avez pris des engagements, vous avez un carnet de commandes ? Il est hors de question que vous venez pénaliser votre processus de production. Donc quand vous voulez pluguer une nouvelle technologie, quelle qu’elle soit, vous voulez être sûr qu’elle marche et vous voulez sûr qu’elle marche au niveau nominal, c’est-à-dire que tout de suite elle soit dans le niveau de performance qu’on avait attendu.
Et deuxièmement, qu’elle ne tombe pas en panne.
Et tout ça, ça nécessite de pouvoir mettre des tests beaucoup plus pointus, presque en situation de production, à côté de la chaîne d’assemblage, à côté de l’atelier, à côté du chantier où, vous êtes en fabrication et donc on a besoin de développer des centres d’essais, des centres, d’industrialisation. Mais il faut que ces centres soient mutualisés. Pourquoi ? Parce que ça coûte cher.
Donc il faut qu’il faut que plusieurs gros industriels, des startups, des écoles et des étudiants puissent venir dans ces centres et progresser tous ensemble. Et ça, c’est un des éléments de mon point de vue fondamental, en lien avec la réindustrialisation de la France. La réindustrialisation de la France ne se fera qu’avec des nouvelles technologies. Pourquoi ? Parce que si on a externalisé, c’est parce que c’était moins cher ailleurs. Donc si on ramène sur le territoire, les prix vont augmenter. Donc le seul moyen de faire de la productivité, c’est de faire de la modernisation et d’utiliser les nouvelles technologies. Mais pour utiliser ces nouvelles technologies, il faut des centres mutuels de développement. Il commence à en avoir en France, on en voit dans le monde de la logistique. Il faut qu’on en voit dans le monde du process et il faut qu’on envoie aussi dans le monde de l’énergie, dans la maîtrise des consommations. Il faut sans doute qu’on ait des simulateurs de process qui permettent de vérifier que les systèmes de capteurs vont bien et que le système de contrôle qu’on met en place fonctionne bien et que les interventions sont possibles et ainsi de suite.

Quel est l'avenir de l'industrie 4.0 et est-ce qu’on s’apprête à avoir un retour de l’humain au centre des industries, ce qu’on appelle l’industrie 5.0. Comment les entreprises peuvent-elles se préparer à l'évolution continue des technologies et des tendances ?

L’humain est à considérer dans la problématique et il est à considérer de plus en plus fort. Et en fait, je pense qu’au-delà de ça, ce sont les communautés. Moi, j’aime beaucoup la notion de cerveau collectif dans les approches, c’est de se dire que l’on est à un endroit où on a un problème, mais c’est à peu près sûr qu’il y a quelqu’un autour de nous qui a le neurone qui nous manque pour régler le problème. Et ce neurone, il n’est pas nécessairement en Chine, il n’est pas nécessairement aux États-Unis, il n’est pas nécessairement au Japon, il est peut-être juste à côté de nous. En plus, il a la même culture que nous, il emploie le même langage que nous, c’est plus simple et c’est moins cher. Ça consomme moins d’énergie et donc on a toute cette relation à tisser autour des nouvelles technologies.
C’est un peu ce que j’ai expliqué tout à l’heure entre l’ancien et le nouveau, qui se mettent ensemble à la fois sur les savoir-faire et sur nouvelles technologies. Il y a des développements importants en termes de management, en termes d’organisation de l’entreprise qui vont et qui vont bouger les choses.
On voit bien aussi les jeunes nous disent “Dans mon entreprise, dans mon métier, dans mon travail, j’ai besoin qu’on y donne du sens” et on a du mal à définir ce que c’est que ce sens. Ah bah moi, j’ai du sentiment que j’en ai la perception que j’en ai, c’est que, en fait, il y a une recherche de formes de solidarité, de travailler ensemble, de travail d’équipe.

Ça vient un peu provoquer tout cet individualisme qu’on reproche dans notre société aujourd’hui, avec un enfermement un peu sur soi dans un monde très connecté. Peut-être que le monde du travail a besoin, lui, au contraire, d’ouvrir et permet aux gens de travailler, travailler ensemble de manière solidaire. 

J’aime beaucoup le mot hybridation. Et quand on parle d’hybridation, on parle toujours d’hybridation entre des technologies, entre des produits. Moi, j’aime beaucoup parler de l’hybridation entre les technologies et l’homme et c’est là que ça se joue.
J’ai un exemple, on a cherché pendant des années. Je pense qu’on cherche toujours à faire le robot qui visse et qui détecte quand la visse est défectueuse.

Et cette perception de la visse défectueuse que l’homme a. C’est-à-dire que quelqu’un qui visse quand la visse est foiré, il le sent tout de suite. Il va s’arrêter, il va prendre une décision de démonter la visse et tout ça.
Pour développer le robot correspondant à cette perception-là. Ça coûte des millions d’euros et donc maintenant, très souvent, dans l’interprétation humaine, on fait un COBOT moins développé, qui va met en position la visse, qui va tout calculer : le bon emplacement, la bonne vitesse, le bon contrôle de la visseuse. Mais le geste final de vissage, c’est l’homme qui le fait.

C’est un exemple, c’est une caricature, mais c’est ça la réflexion.
Et donc là, je donne un exemple d’un homme et d’une machine. Mais imaginons une cohorte humaine avec un réseau de drones ou de machines. Quelle interaction on peut mettre en place, jusqu’où l’humain reste le maître et ainsi de suite. À mon avis, c’est ça l’avenir de la notion de 5.0, c’est une communauté de drones, une communauté humaine. Et comment tout ça interagit et s’hybride.

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